Editorial

La revue qui vous dit tout sur les coopératives d’habitation…

Edito

Chères lectrices, chers lecteurs,

une lancinante pénurie de logements à loyers abordables sévit en Suisse (et dans toute l’Europe). Les efforts de la Confédération n’ont pour l’instant débouché sur aucune avancée significative pour y remédier. Fidèles à leur doctrine simpliste de l’offre et de la demande, les acteurs du marché immobilier «libre» s’égosillent à quimieux-mieux pour une dérégulation sensée relancer la construction de logements (pas vraiment abordables). Quant aux faitières des coopératives d’habitation, elles constatent la lente érosion de leur part du marché immobilier, qui a chuté à 3,93% au niveau Suisse en 20221 . Mais il ne suffit pas de construire plus. Il faut construire mieux. Et pour cela, il serait bon de commencer par combler le vide laissé par la politique publique du logement en vue de freiner un tantinet les investissements spéculatifs opportunistes qui gangrènent le marché du logement.

L’UE s’y emploie depuis cet automne, avec la nomination d’un Commissaire européen au logement, chargé d’élaborer un plan européen pour le logement abordable, assorti d’une plateforme d’investissement pour des logements abordables et durables et d’une révision des règles d’aides de l’Etat en la matière.

En Suisse, c’est plus compliqué. Sur les 246 parlementaires qui siègent dans les deux chambres fédérales, 150 sont liés au secteur de l’immobilier, de la construction, des banques, des assurances ou des caisses de pension2 . Les lobbys immobiliers savent se faire entendre et ne sont sans doute pas totalement étrangers au faible soutien consenti aux MOUP. Heureusement que certains cantons et communes y remédient un tant soit peu, parfois en bonne intelligence avec les MOUP. Mais les soutiens varient fortement selon les régions.

Dans ce contexte, il peut être salutaire d’élargir le champ de réflexion. C’est ce qu’a fait Sasha Nick, physicien et économiste de formation et chercheur en transformation sociétale à l’EPFL, qui propose un regard novateur sur l’avenir de l’habitat en Suisse, avec un scénario radical et visionnaire: un moratoire sur les nouvelles constructions, la transformation du bâti existant, une réduction de la surface habitée par personne, et une limitation de l’étalement urbain (lire pp. 6-11). Autrement dit: pas construire plus, mais mieux répartir l’existant, entre optimisation, réhabilitation et transformation.

Très innovantes en termes de typologies d’habitation et d’inclusivité sociale et générationnelle, les coopératives d’habitation font déjà partie de la solution. Elles commencent même à se lancer dans les méandres encore à défricher de la construction circulaire, notamment en mode réemploi, (lire pp. 12-19 et pp. 26-33).

Très bonne lecture, et à bientôt, pour suivre les actualités sur www.habitation.ch

Patrick Clémençon

1 Voir la récente publication conjointe de l’OFS et de l’OFL -> Statistique du logement d’utilité publique 2024
2 «Le pouvoir des lobbys immobiliers», paru le 6 septembre 2024 dans Mieten + Wohnen